Le banc

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Pour être tout à fait franc avec vous, ma promenade d’hier ne doit rien au hasard. J’avais l’espoir de le voir là. Assis sur son banc. Ce banc dont il a déjà parlé plus d’une fois. Où il a l’habitude de s’asseoir pour voir passer le monde avec la sagesse de ceux qui n’attendent pas grand-chose et sûrement plus personne.

D’ailleurs, je me suis souvent demandé à partir de quel moment on s’enracine dans le monde de ceux qui n’attendent plus personne. Qui restent là, avec la simple ambition de pouvoir profiter de quelques matins dorés et de fins de jour au doux souffle apaisant de fraîcheur.

Je me plais à l’appeler «Gamin». Je ne sais pas s’il l’aime vraiment ou s’il tolère ma largesse de langage. Il n’a pas l’air contrarié en tout cas. Certainement qu’il sait que mes mots n’ont rien d’insolent.

Nous avons ri. J’aime l’entendre rire. J’ai toujours aimé entendre rire les gens. Mais il y a certains rires qui collent au ciel de votre cœur, comme des étoiles dans une nuit d’été. Son rire, rouque et fatigué, appartient a ceux-là.

Quelquefois, j’ai l’impression, peut-être n’est-ce qu’une impression, qu’il me parle avec tendresse… Il me vient à l’esprit, plus que ses mots, la douce musicalité de sa voix dans sa façon de me dire : « J’ai lu ton texte, ah mon salaud, tu lui en as mis plein la tronche… mais quel salaud!... »

Personne ne m’avait jamais traité de salaud. Enfin, pas avec ces mots-là. Avec ce rire qui sonne à mon esprit comme une musique amicale adoucie par une harpe ancienne.

Puis nous avons encore parlé. De bêtises. Je lui ai lu des bêtises. Il a ri. Puis, je lui ai promis de les oublier. Tous. Ceux à qui nos souvenirs donnent parfois beaucoup trop d’importance.

On s’est quittés sans promesses. Mais je sais qu’un de ces jours… le hasard de ma promenade m’emmènera encore vers son banc, dans l’espoir de le voir assis avec la sagesse de ceux…

 

À propos de dubleudansmesnuages

Je laisserai vagabonder mon esprit nomade, sur le fil d'or de mes silences, pour vous parler des ces choses qui me maintiennent en équilibre. Je vous parlerai aussi des musiques que j'aime. Elles se promènent du Fado d'Amália, de Dulce Pontes, de Cristina Branco, de Mariza, jusqu'aux voix frissonantes de Diana Krall, de Stacey Kent, de Chiara Civello, de Karrin Allyson, de Stina Nordenstam, de Robin McKelle, de Sophie Milman, d'Emilie-Claire Barlow, et d'encore plein d'autres … Aznavour, Brel, Duteil, Art Mengo, Berliner, Cabrel, Balavoine, Julien Clerc, Fugain, Le Forestier, Goldman, Lama, Rapsat, Vassiliu, Daniel Seff, Peyrac et tous ceux que m’on fait aimer la chanson française. Je me perdrai certains soirs dans le paradis de la musique brésilienne : Eliane Elias, Astrud Gilbert, Gal Costa, Elis Regina, Bia, Bebel Gilberto, Maria Creuza, Nara Leão, Jobim, Vinicius, Buarque, Toquinho, Djavan … Il y aura des moments où je vous parlerai d'une des chansons de ceux que j'affectionne. Donovan, Leonard Cohen, The Doors, Tracy Chapman, The Scorpions, Dylan, Lennon ou McCartney (avec ou sans les Beatles), ou de voix d'or comme Sarah Brightman, Ana Torroja, ou Teresa Salgueiro. Puis, parfois, je me promènerai sans but précis entre Piazzolla et Lluis Llach, de Mayte Martin à Gigliolla Cinquetti ou Paolo Conte, de Chavella Vargas à Souad Massi en passant par Gabriel Yacoub. Parce que la musique n’a aucune frontière. La musique ne connait que des sensibilités. Des sonorités. Des larmes ou des sourires. Je vous déposerai ici l'une ou l'autre de mes photos. Les moins ratées. Je vous laisserai un peu de poésie. Des poètes portugais. Que j'aime. Infiniment. Et puis tous les autres dont les textes me touchent. Je ne vous parlerai que des gens que j’aime. Et puis un peu de moi. Si peu. Et puis, si j'ai le temps. Seulement si j'ai le temps, je vous parlerai d'autres choses. Plus intimes.
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4 réponses à Le banc

  1. JC dit :

    “J’ai lu ton texte, ah mon salaud, tu m’en as mis plein la tronche… mais quel salaud!…”
    Merci Armando

  2. Lali dit :

    Il n’y a pas d’âge pour ne plus rien attendre, assis sur un banc… Mais c’est aussi comme ça que l’inespéré arrive…

  3. marcel dit :

    Une pensée bien chaleureuse à l’intention de ceux qui restent là, seuls, sur un banc, avec …pour seule ambition de goûter un jour heureux.

    Voilà qui traduit avec justesse la détresse de ceux qui n’ont plus rien à dire , si ce n’est à eux-mêmes.

    Un très beau texte, très émouvant.

  4. Denise dit :

    Splendide message affectueux pour celui qui le recevra…

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