La librairie Portugal est née en 1941. En pleine Seconde guerre mondiale. Dans un Portugal où la dictature faisait semblant de ne pas prendre part au conflit, tout en maintenant une alliance avec les forces alliées, puis un pacte de non-agression avec l’Allemagne nazie.
Les trois amis, Pedro Andrade, Raul Dias et Henrique Pinto, n’étaient animés que par leur amour inconditionnel des livres et, même si pour beaucoup ils pouvaient passer pour de doux rêveurs incapables de comprendre un monde qui pouvait entrainer à tout moment le Portugal dans le terrible conflit que connaissait le reste de l’Europe, ils considéraient que les livres étaient importants, et même que, en petite quantité ils étaient nécessaires en toute circonstance et permettaient de faire face à toutes les vicissitudes. Pour eux, il était indispensable d’amener la lecture partout et de croire que chaque livre était nécessaire.
Et pendant 70 ans, la Librairie Portugal a été unique en son genre, publiant même un bulletin bibliographique qui, non seulement, faisait état des nouveautés littéraires mais était très recherché pour la qualité de ses articles.
Petits éditeurs et des générations d’amants de la littérature et des livres spécialisés ou techniques avaient la Librairie Portugal dans leur carnet de route, au cœur de Lisbonne, juste à côté de l’ascenseur de Santa Justa, construit par un disciple de Gustave Eiffel et qui, dès 1902, relie la basse Lisbonne au fameux Bairro Alto.
Mais voilà, il y a eu l’ouverture d’une succursale de la FNAC (vous savez, ce lieu très impersonnel où des vendeurs vous racontent souvent n’importe quoi dans le seul but de ‘faire du chiffre’) un peu plus haut. Puis les ventes de livres par Internet. Les livres sous support électronique.
Et voilà que l’inexorable mutation des sociétés a eu raison du parfum unique des livres et de l’atmosphère feutrée et chaleureuse d’une librairie. Le cœur de la Librairie Portugal a arrêté de battre au bout de 70 ans. Elle ferme aujourd’hui ses portes.
Avec elle s’en va un morceau de nos vies. De ceux qui aiment flâner en lisant quelques lignes d’un livre duquel nous ignorons tout jusqu’au nom de l’auteur avant de franchir la porte. Fini le sourire de ceux qui vous accueillent en vous indiquant à l’étagère près, parmi des centaines d’autres, le livre que vous avez cherché partout et que sans lui vous n’auriez jamais trouvé. Et puis la conversation qui s’engage. L’échange de quelques mots à propos de l’héroïne, ou du roman, ou de l’auteur. Fini le temps où celui qui vous accueillait faisait plus que de la vente. Il partageait du savoir et des émotions. Il partageait sa passion. Et cela ne se remplace pas.
La Librairie du Portugal ferme ses portes. Et c’est Lisbonne qui se vide de son âme d’antan.
Dans une presque indifférence. Hélas!…
[Toutes les images proviennent de la toile]
Encore une partie de mes souvenirs qui s’en va. Je suis passé devant des centaines de fois en regardant des livres que j’aimerais un jour avoir…quelle dommage, je suis triste!!
Et à Toulouse, la Librairie Castela a fermé, ce mois-ci, ses portes !
Le papier disparaît et c’est bien dommage…
Elles disparaissent. Dans quelque ville que ce soit, les librairies cinquantenaires ou centenaires disparaissent sous le poids des grands réseaux ou des pressions des grands distributeurs. Hélas!